mmaire
lre Année
N° 46. Dimanche 22 Décembre 1895
L'INFAMIE.
at
LE NUMÉRO 10 CENTIMES.
Rédaction et Administration
12, rue des Paruissiens, 12
BRUXELLES
Cherchez d'abord le Royaume de Dieu et Sa Justice
Et le reste vous sera donné par surcrolt.
PAR AIT TOUSULES rSAMEDIS
ABONNEHIENT8: AHÏHÏOHÏCILS
BELG1QUE |4« page, 0,30 .a line
Trois mois, fir. I..50 Faits-divers, 2 fi*.
Six mois 3. Les annonces sont re-
Douze mois 5. 'gues a l'Administration
Etranger (port en sus) du journal.
La Justice Sociale. L'Infamie.
A. D. A profos du droit de grève.
A la Federation dimocratique chritienne.
Alcbste. Le rigne de la Bite.
SEMAINE PARLEMENTAIRE.
Abbé Henry Mcbllbr. Pour I'Idlal.
ARTS.
Mgr db Harlbz. Le mouvement ouvrier
(suitej.
Aristide Dupont. Le nouveau rigime
fiscal des successions cn France.
JOYEUX PROPOS.
Ernest Allo. La raison du plus fort.
L. L'Impót sur le revenu.
ÉC-HOS.
Le Conseil des hospices d'Alost vient
d'aviser M. l'abbé Daens, représentant,
que l'entrée de la chapelle de l'hópital,
la seule qui lui fut ouverle k Alost pour la
célébration du Saint Sacrifice de la messe,
lui est désormais interdile.
De ce fait, M. l'abbé Daens se trouve
dans l impossibilité de célébrer la messe a
Alost.
Geci n'est plus une de ces mille vilénies
dont on est coutumier la-bas vis-a-vis du
parti démocratique, c'est 1'infamie elle-
même, 1'infamie essentielle.
Ainsi, dans un pays de toi, il se trouve
des catholiques, d'Ame assez misérable,
pour barrer k un prètre le chemin de
l'autel I C'est une honte pour la Belgique
Et de quel droit, s'il vous plait, ces
gens la transforment-ils le sanctuaire en
club politique
M. l'abbé Daens est député démocrate
chrétien. Voila tout le grief.
Et parce qu'il est ceia, défense lui est
faite, de par quelques tyranneaux, d'ap-
procher de son Dieu I Attitude effrayante
de bêlisme et de cynisme.
Le but secret de cette mesure, qui rap-
pelle par quelque endroit le fameux
Kulturkampf( voir lesceuvresdeM. Woeste),
tout le monde le devine et il convient de
le révéler, si salanique soit-il, c'est
d'alteindre ïhomme politique par le
prêtre. Oui telle est l'eftroyable pensée de
derrière la lète des tout pelits Bismarck
d'Alost.
Le moyen de réussir, ils croient l'avoir
trouvéils s'efïorceront de tout leur
pouvoir d'isoler le Prêtre de son Dieu, le
serviteur du Maltre. Ce n'est pas la
première tentative de ce genre qui est
faite, mais c'est la plus effroyablement
perverse.
Quelle abberration de l'esprit catho-
lique Dn jour Jésus-Christ a chassé les
vendeurs du Temple; et voici que les
vendeurs prennent leur revanche et
chassent k leur tour Jésus-Christ. Car ils
le savent trés positivement, ces catho
liques dévoyés, on le leur a dit cent fois,
ils l'ont peül-être répété eux-mêmes
le Prêtre et Jésus-Christ c'est tout un,
celui qui méprise l'un, méprise l'autre.
Au milieu du silence pénible de la
presse calholique nous croyons de notre
devoir d'élever la voix et de protester
contre l'mfamie perpétrée par le conseil
des hospices d'Alost. Se taire, en pareille
circonstance, équivaudrait a se rendre
complice du crime.
Parlamême occasion, nous envoyons
k M. l'abbé Daens un particulier té-
moignage de sympathie.
Du courage, Monsieur l'abbéon peut
vous empêcher d'aller Dieu paria messe,
on ne saurait interdire a Dieu d'aller a
vous et vous a Lui par la prière.
La Justice Sociale.
P. S. Au dernier moment nous appre-
nons que, par ordre de Monseigneur
l'évêquede Gand, la chapelle des Carmé-
lites d'Alost a étéouvertcaMóbsieiii Kabbé
Daens.
Que 1'infamie du conseil des hospices lui
reste pour compte, comme la marque de
fer rouge de jadis a l'épaule des formats.
N'est-ce pas contre l'ordre social, contre
ltj gouvernement qui le représente que
s'adresseraient désormais les clameurs indi-
gnées de tout le peuple ouvrier N'est-ce
pas alors que, a jusle til re, les truvail-
leurs s'écrieraient que toute la force de
l'Elat est a la devotion des riches et des
industriels
Non, le contrat de travail, n'est pas un
coutrat ordinaire. Le mettre sur le pied de
la généralité des conventions, dont l'inexé-
cution se traduit par un droit k des domma-
ges intéréts, c'est fausser son esprit.
L'ouvrier n'est pas libre, la nécessité de
vivre le contraint d'accepter un salaire sou
vent Irop minime. Et si, par l'union de tous
les intéressés, il arrive contrebalancer
l'influence écrasante de l'employeur, il ne
fait que rendre al'industrjel la monnaie de
la pièce, répondant a la force par la force.
Nul plus que nous ne réprouve la grève
et son cortège inséparable de ruines et de
misères. Mais, de grSce, que l'on ne
s'acharne pas, par des mesures réaclionnai-
res, a saper les bastions que nous avant lant
dc peine a protéger sous !e feu meurtrier
.o vocidiistl's ia reiigion et la démocratie
chrétienne. A. D.
A propos du droit de grève.
M. Victor Brugmans, avocat a I.ouvain,
vient de publier une étude juridique sur le
Droit de grève.
Somme toute, l'ceuvre est assez banale,
et mérilerait de rester planer dans lessphè-
res sereines du droit, n'étaienl les conclu
sions quelque peu originates de l'auleur.
II voudrait que toute grève se résolut par
une créance k fa charge de la personne qui,
a la lumière des principes juridiques qu'il
essaye d'établir, se trouve en faute.
Des domraages-intérêts searient a récla-
mer par l'ouvrier victime dun lock-out
comme par le patron, victime de la grève,
si eellc ci avait un motif illégitime,
Parmi ces motifs illégilimes, M. Brug
mans classe bravement toute réclamatiou
d un salaire supérieur.
L'on voit que l'auleur revient de loin il
en est encore k admettre que la volonté seule
du patron détermine le salaire, comme si
aucune considération supérieure de morale
n'obligeait l'employeur vis-è-vis de ses
employés.
Après ce lumineux exposé, l'auteur se
demande comment recouvrerces dommages-
intéréts qu'il alloue généreusement a la par-
tie contractante victime de la suspension du
travail.
Pour le patron, la chose est facile.
Mais pour l'ouvrier
Son salaire est de fait insaisissable. Son
chélif mobilier ne suflirait pas k payer huis-
siers et recors. Eosuite, ne serait-il pas
gênant pour un patron d'avoir a poursuivre
ses ouvriers Ne se couvrirait-il pas de ridi
cule autantque d'aversion
L'auteur a trouvé le moyen de lout con-
cilier.
L'Etat serait chargé d'exécuter les grévis-
tes il prendrait sur lui l'odieux de la pour-
suite, de la saisie et de la vente forcée
meubles des malheureux ouvriers.
L'on se demande lire de semblables
réflexions, s'il n'est pas certains hommes
qui ont pris k tèche de discréditer définiti-
vement le régime social qu'ils prétendent
défeudre.
Supposez un instant l'Elat investi de ce
pouvoir exorbitant.
A laFédération Démocratique chrétienne
Le Peuple s'est occupé de la Fédèration
démocratique dans son numérodu 14décembre.
1! a annoncé k ses lecteurs que la Fédèration
s'étaient réunie pour discuter l'escroquerie
dont les conservateuis s'étaient rendus cou-
pibles contre les ouvriers lors des elections
communales L'organe socialiste ajoute que
M Magdelyns avait déi'andu le droit des
oitvriers mais que M.Renkin s'était fait l'avo-
c&t des conservateurs,et qu'il avait eu facile-
inent raison de M. Magdelyns.
Tout cela étaitfaux inventé probaflement
pour nuire a la Fédèration et la déconsidérer
aux yeux des ouvriers.
M. Renkin a ccrit au Peuple pour démen-
tir eet article. Notre collaborateur affirmait
dans sa lettre que la Fédèration s'était réunie
pour discuter ses statuts et nullement pour
discuter co qui s'était passé lors des elections
communales, que par conséquent les racon-
tars du journal socialiste étaient de la pure
fantaisie.
Le Peuple a enregistré le démenti et n'a
pas songé un instant k maintenir ses affir
mations. Mais le lendemain il posait k M.
Renkin diverses questions au sujet de cette
séance. Ces questions tendaient a établir quo
Mj Renkin aurait proposé k la Fédèration de
donner droit de vote au poll mêine aux mem
bres protecteurs des Maisons des Ouvriers.
C'était encore faux, et le Peuple a du sur ce
point comme sur l'autre enregistrer un démenti
formel.
Voici maintenant ce qui s'est passé. Notre
ami Magdelyns proposait a la Fédération de
n'admettre au poll pour la désignation des
candidats que les seuls membres ouvriers des
Gercles affilié*.
D'autres étaient d'avis d'admettre tous les
membres quelconques, protecteurs compris.
M. Magdelyns justifiait sa proposition en
disant que si on admettait au poll des mem
bres autres que les ouvriers, ceux-ci seraient
démocratique k n'être qu'un mouvementpure-
ment ouvrier. Le miuvement démocratique a
pour but nou pas de défendre les droits des
seuls ouvriers, mais de faciliter la vie a tous,
d'amener plus de bien-être pour tous les tra-
vailleurs.en combinant plus heureusement
toutes les activités. Ouvrier ne signifie pas
nécessairement démocrateni démocrate
nócesairement ouvrier.
II importe d'avoir lè-dessus des conceptions
justes, c'est-a-dire larges, sinon le mouve
ment démocratique chrétien deviendra im-
puissant.
L°s socialistes qui, dans le Peuplees-
saient desuspecter la Fédèration parce quelle
n'a pas voulu exclure les démocrates qui ne
sont pas ouvriers, ont grand soin de ne pas
pratiquer les principes qu'ils prêchent. Voyez-
leurs états-majors et dónombrez-les, vous
verrez qu'il y est laissé une large place aux
intellectuels et que le parti socialiste s'en
trouve bien.
Cette question était délicate. Nous croyons
que laFédération lui a donné une solution
juste en décidant que serait admis au pollles
membres des Cercles affiliés qui ont droit de
vote aux assemblees générales.
Cette formule exclut les membres protec
teurs, mais n'exclut pas nécessairement les
membres non ouvriers.
Au surplus c'est, d'après nous, une erreur
capitale de vouloir restreindre le mouvement
Le règne de la Béte.
Encore un mot que les Zolistes odI dévo-
tement soustrait a l'Evangile selon St-Jean
C'est un phénomène bien remarquable que
cette absence de génie inventifqui caracté-
rise les difiérenles sectes de notre école
d'épicure, fin de siècle.
La bétehumaine a été décrite de mains de
maitre par les premiers pères de l'Eglise
ceux-ci n'hésitaient pas k dénoncer ouverte-
ment a Ia face du monde, non seulement la
corruption du monde païen expirant mais
des speudo chrétiens qui abritaient dès lors,
en grand nombre, Ieurs vices, leur égoïsme
et leur honteuse hypocrisie k l'ombre des
temples et des sacristies.
Dans les sermons laiques (lay sermons)
qui ne sont rien moins que des prètres de
parpailots le célèbre Huxley dénongait
il y a vingt ans déjii, a la vendiete publique
ces malfaiieurs de lettres dont Ia terre de
France parait sélectionner tout particulière-
ment la graine depuis Voltaire et Jean-
Jacques Rousseaux (1) et dont les Renan
et l'innombrable pleiade des miauleurs
langoureux et sensuels de son école, véri-
tables microles pathogènes de l'esprit mo
derne, représentent les descendants en ligne
directe.
Ces guitarisles plus ou moins hyslériques,
mais incurablement vicieux sont parvenus
tirer de leur instrument perfectionné qui
s'appelle la langue frangaise des accords que
l'on prendrait parfois, comme le dit trés
spirituellement le physiologiste d'outre-
Manche, pour l'harmonie des sphères.»
Mais ils sont outrageusement ignorants
des vérilés naturelles el surnaturelles qu'il
importe le plus a l'homme de connaitre.
Et dire que ce sont ces insulfisants, ces
rêveurs incoherents, ces cerveaux vides et
creux qui ne vivent que de sons, de formes
et de vains accords, qui se sont emparés de
la direction de l'esprit public, non-seuletnent
en France mais dans plusieurs pays voisins,
pour ne pas citer le notre
Ce sont eux qui ont fait main basse sur la
presse qui forme les moeurs et l'opinion, qui
relèveou abaisse le niveau inlcllectuel et
moral des peuples...
Ce sont eux qui ont ramené dans nos
(1) Revue ties questions scicntiflques do Bruxelles.
1878, livr. d'avril.